Au cœur du sensible
Au commencement de notre vie, nous entamons tous un chant, une mélodie, une mélopée ondoyante unique à chacun. Dans ce chant est inscrite toute la mémoire de notre histoire et de notre devenir.
Cette histoire a commencé, non pas quand nous sommes nés, mais bien avant, au moment où nous avons été conçus, où nous avons été « rêvés », désirés ou pas.
Et les évènements, bons ou mauvais, et même les absences d’évènements, ont laissé en nous leur empreinte.
Sur cette onde mélodieuse, tout est minutieusement « noté », les notes justes et les fausses notes, des plus étincelantes aux plus stridentes, les notes aux accords grinçants et parfois cassants, les ruptures, les silences et les oublis…
La pratique écologique du Wutao® a la douceur de sa puissance. Elle sonde nos profondeurs abyssales pour capter, tel un sourcier, le chant de notre histoire, la pulsation primordiale à qui nous devons d’être « là » aujourd’hui. Parfois ignorée, elle reste cependant enfouie au cœur de nous-même et nous y avons subtilement accès.
Nous pouvons ainsi laisser le mouvement ondulatoire de notre colonne vertébrale en se déployant défroisser tendrement et amoureusement nos tensions, comme la « chair » si délicate d’un pétale de coquelicot… Pour redonner confiance à notre ressenti, apprivoiser et rester dans l’intime sentiment d’une présence à nous-même.
Telles les volutes de fumée, l’onde, sur son passage, désagrège alors ce qui est épais, rend liquide ce qui est solide, moelleux ce qui est dur, fait fondre ce qui est de glace et effrite ce qui doit tomber en poussière pour qu’enfin, désentravés, nous puissions donner libre cours à l’expression de notre chant primordial.
Je pense aujourd’hui à toutes ces mélodies blessées… A tous ces nouveaux-nés de la fin du siècle dernier qu’ont été nos parents et nos grands-parents, dont on pensait qu’ils n’étaient, ni des personnes à part entière, ni des êtres sensibles. Dénués d’émotions et de sentiments. Dont on pensait qu’ils ne ressentaient pas la douleur. Opérés à l’époque sans être endormis, il n’existait personne pour établir un lien si manifeste entre leurs cris et ce qu’ils étaient en train de subir.
Heureusement, nous n’en sommes plus là. Car il a suffi qu’une femme ose un jour, oui, ose, un « regard » sensible et conscient. En 1939, Françoise Dolto (1908 – 1988) change notre perception du nouveau-né au travers de sa thèse « Psychanalyse et pédiatrie ». Plus tard, un homme au regard empli de « féminitude », Frans Weldman (1921-2010) crée l’Haptonomie, science de l’affectivité. Tandis que Frédéric Leboyer (1918), posa un nouveau regard sur la naissance dans son ouvrage « Pour une naissance sans violence » publié en 1974, etc.
Les percées de quelques-uns dans le passé ont ainsi permis à d’autres aujourd’hui de bénéficier d’une ouverture à un sensible si originellement féminin. Féminin qu’il a fallu et qu’il nous faut encore affirmer sans nous dispenser de poursuivre l’éveil d’une intelligence lovée au cœur de nous-même !
Pratiquer une « conscience du sensible » nous offre dès lors ce qui nous a tant manqué au début de notre vie pour défroisser délicatement toutes les empreintes de notre histoire.