Homo Ludens
Jouer pour chevaucher les courants du 21e siècle
Resterons-nous dans l’histoire comme la dernière génération qui aurait encore pu renverser la vapeur pour sauver la biodiversité et l’humanité… et aura choisi par défaut de ne rien faire ? Panne de conscience et d’inspiration ? Les peurs et les égoïsmes nous asphyxient. Homo Sapiens (qui sait) et Homo Faber (qui fabrique) sont bel et bien englués dans leurs calculs et leurs raisonnements(1). La société civile se contorsionne sous le règne de « l’immédiateté »(2). En réalité, pour répondre aux défis du 21e siècle, c’est de « savoir-être » et de pratiques au quotidien dont nous avons besoin. Les valeurs seules ne suffisent pas.
Le jeu, catalyseur de changement
Où sont donc les portes des sagesses, des dynamiques de vie ? Comment puiser à la source des solutions créatives ? Et bien je vous invite à chercher du côté du jeu. Jouer est une fonction primordiale pour le développement de l’humain. Le jeu est déjà reconnu pour ses vertus pédagogiques et sociales. Et je suis convaincue que les jeux pour la connaissance de soi, tout particulièrement, sont des ressources efficaces pour tracer la voie du changement. Ces jeux et outils ludiques, parfaitement dans l’air du temps, accessibles pour quiconque désire arpenter les chemins de la conscience, sont autant de tremplins et de leviers puissants.
Un simple coup de dé ou une carte tirée au hasard, et c’est parti ! Quels sont mes souhaits et mes objectifs ici et maintenant ? Quelle est ma relation aux autres ? Qui suis-je ? Comment est-ce que j’habite le monde ?… Et quelque chose en vous va bouger. De nombreux jeux fonctionnent déjà dans cet esprit. Je citerai parmi les fleurons du genre le Jeu de la Transformation, le Jeu du Tao, les Cartes de l’Enfant Intérieur, les Cartes OH et les Cartes Habitat(3). Connus à l’origine dans les réseaux du développement personnel, ils rencontrent actuellement un vif succès.
Que la « partie » dure vingt minutes ou cinq heures, que l’on joue seul ou en groupe, ils mettent en mouvement l’humain en nous. Au-delà du plaisir immédiat de jouer, le processus nous touche à travers divers aspects : effet miroir du jeu, parenthèse d’introspection, compréhension de nos vulnérabilités, connexion à notre force intérieure, diversification des expériences vécues, rencontre avec l’autre, approche du changement de perspective. Ils nous permettent d’exercer notre spontanéité et notre créativité, individuellement et collectivement.
Les Cartes OH par exemple stimulent superbement nos facultés associatives, à travers une exploration de l’inconscient ; elles nous entraînent vers la combinaison d’idées, de plans a priori étrangers(4). Cela peut soudain nous catapulter vers des démarches et des solutions inédites.
Osons aussi dans la foulée imaginer des combinaisons entre jeux et pratiques énergétiques. Je pense notamment au Wutao, qui porte aussi en lui l’aspiration à la connaissance de soi.
Les effets de ces dynamiques, de cet entraînement, se ressentent ensuite au quotidien. Car plus nous pratiquons ces jeux, plus nous accédons à la profondeur et à la subtilité, plus notre cœur s’ouvre. Nous sommes dès lors capables d’assumer notre responsabilité personnelle, de changer notre relation à l’autre et de nager dans les courants ascendants de la vie. Peut-être de là saurons-nous mieux répondre aux enjeux de notre monde.
(1) « Homo ludens, Essai sur la fonction sociale du jeu », J. Huizinga, 1938.
(2) « La dictature de l’immédiateté », Stéphen Kerkhove, éd. Yves Michel, 2010.
(3) Cartes OH et Habitat font partie d’un genre : les Cartes Associatives.
(4) La « bissociation » : Arthur Koestler désigne sous ce terme un des processus-clés de l’inventivité et de l’innovation, « Le cri d’Archimède », 1955.