La coupe de l’amour
Dans son ouvrage consacré au Processus Hoffman (1), 4 étapes pour commencer à vivre (2), Tim Laurence utilise l’image archétypique de « la coupe de l’amour » pour exposer les émotions polluant notre source d’accueil inconditionnel de l’autre et de nous-même. Au fil de nos expériences malheureuses, notre potentiel d’amour pur se recouvre de cinq strates émotionnelles stagnantes. Pour retrouver l’état originel, il nous faut filtrer ces dépôts sédimentés, étage par étage:
1er niveau : la peur
Mécanisme défensif qui consiste à décoder les perceptions corporelles et psychiques pour donner l’alerte face à un danger, la peur nous aide à évaluer s’il vaut mieux fuir, négocier ou attaquer. Mais il arrive que la mécanique s’enraye lorsqu’une agression nous dépasse, la peur se mue alors en état sidérant. Dès lors nous chercherons à éviter ce qui rappelle cette émotion insécurisante.
2ème niveau: la douleur
La douleur se manifeste souvent par un chagrin qui révèle que nous ne sommes pas en accord avec ce que nous vivons. Parce que cet indicatrice est inconfortable, nous tendons à la mettre à distance en compensant le manque par des conduites addictives. Pourtant, si nous laissions nos larmes faire leur travail guérisseur, nous verrions le chagrin s’estomper puis disparaître.
3ème niveau: la honte
Jumelle de la culpabilité, la honte remet en cause notre légitimité à recevoir de l’attention. Quand la culpabilité peut être fondée (je me sens mal car je sais avoir nui à l’autre sciemment), la honte incite à l’autopunition en fortifiant la croyance que nous sommes mauvais et méritons des privations. Le seul antidote pour s’en défaire est de cultiver la compassion pour l’enfant que nous avons été.
4ème niveau : la colère
La colère a pour fonction salutaire de poser des limites justes entre soi et les autres, de faire respecter son espace et son identité face aux abus potentiels. Le problème surgit lorsque nous nous censurons et différons son expression. Elle risque alors de ressortir de manière disproportionnée et injuste à la moindre occasion.
5ème niveau: la vengeance
La vengeance est une extension injuste de la colère. Quête violente de réparation , elle se double du désir – parfois obsessionnel – de dominer pour ne plus être soumis. C’est l’ombre de notre vécu de victime, qui justifie son envie de revanche par la loi du Talion ou en imposant ses ressentis comme des vérités absolues.
Dissoudre ces couches d’affects qui nous empoisonnent reste très difficile, surtout lorsque le vécu qui les a développées est fortement traumatique (3). C’est pourtant l’unique façon de trinquer amoureusement avec autrui et d’étancher notre soif d’affection et de reconnaissance.
(1) du nom de Bob Hoffman, créateur de ce protocole de thérapie enchaînant prise de conscience, expression, pardon et comportement adulte.
(2) paru en français aux éditions du Souffle d’Or
(3) je pense ici aux personnes violées, torturées, battues pendant des années