La voie du cercle
Partager le temps de parole
Sans cesse, nous essayons de réinventer nos moyens d’échanges et de circulation de l’information. Voici quelques pistes à suivre…
Lorsqu’un cercle d’individus se constitue pour échanger, discuter ou créer, se pose à lui un certain nombre de questions qui vont influencer le résultat et surtout les étapes pour parvenir au but choisi. Que ce soit simplement pour partager autour d’un sujet, pour prendre des décisions ou encore une réunion de créativité, il convient de trouver l’architecture, les règles ou la méthode à suivre pour qu’une intelligence collective puisse émerger et accompagner le groupe vers son objectif final.
Le bâton de parole pour échanger
Le cercle de parole amérindien, aussi utilisé par les Quakers, consiste le plus souvent à faire tourner un bâton de parole. Cette méthode permet de faire circuler la parole et d’éviter les interventions pendant que quelqu’un parle : celui qui a le bâton s’exprime et les autres l’écoutent. Dans certains cas, on peut accompagner ses propos par des expressions du visage ou des intonations qui abondent dans le sens de ce qui est dit, mais il est important de laisser celui qui a le bâton aller au bout de sa pensée.
La sociocratie pour prendre des décisions
Apparue vers 1960 avec Gérard Endenburg et réactualisée de nombreuses fois, la sociocratie permet à un groupe de s’organiser, de créer des propositions et de les améliorer avec pour finalité la prise de décision collective. Ici s’applique la règle du « zéro objection ». Ainsi, au cours de tours successifs, comme le propose Bernard-Marie Chiquet, le cercle explore la « météo » de chacun qui peut déposer au centre du cercle son état actuel : les faits ou histoires qui le préoccupent. Il se libère ainsi des parasites extérieurs au cercle pour se sentir plus à l’aise lors de la réunion. Puis chacun pose ses intentions. Des propositions sont faites, éclaircies, discutées et bonifiées si besoin. Une proposition est acceptée, non pas au consensus, mais au consentement de tous les membres : lorsqu’il n’y a plus d’objection face à une proposition, alors le cercle peut acter le choix collectif et passer à la phase de mise en place de la décision. Un des moments clés de la sociocratie est l’élection sans candidat afin d’élire un animateur, une secrétaire et un gardien du temps pour faire respecter les règles, collecter les informations clés et rythmer l’évolution du cercle.
Jean-François Noubel, qui applique les principes de l’Intelligence Collective, propose un set de principes* pour développer une écoute et une entente dans le cercle : une longue respiration avant de prendre la parole, l’écoute du centre du cercle, parler au centre, ne pas prendre la parole mais l’offrir, c’est-à-dire sentir le moment juste pour parler. Utiliser le « je » plutôt que le « on », afin de parler de son expérience directe. Un gong ou une cloche au centre du cercle peuvent servir à inviter le silence pour se recentrer si quelqu’un sent que le cercle n’est plus en écoute ou que les principes ne sont plus respectés.
Ces quelques exemples permettent aux individus de s’écouter, de partager le temps et la parole pour que du cercle émerge une voix qui sublime la somme des paroles des membres.
* Ces principes n’ont rien de novateur en eux-mêmes, ils s’appuient sur des courants anciens et plus contemporains, mais ont pu être réactualisés.