Psychologie biodynamique
La rencontre du corps Conscient
Par François Lewin, pionnier de la Psychologie biodynamique et Miriam Gablier, journaliste et formatrice
Créée par Gerda Boyesen dans les années 1950, la Psychologie biodynamique s’inscrit dans le courant des thérapies psychocorporelles néo-reichiennes. A la cuirasse musculaire développée par Wilhelm Reich, elle ajoute la notion de cuirasse tissulaire.
Nous avons tendance à oublier une vérité fondamentale et très simple : notre corps est le réceptacle du mystère vivant. C’est là que toute l’alchimie de la vie se déroule. Sa participation aux processus de la psyché est inestimable car il est notre terrain de jeu, de réalisation et de transformation. Nous voyons alors, en Psychologie biodynamique, comment notre corps accueille notre psyché et surtout combien il est source d’une sagesse insoupçonnée.
Le corps, creuset de la psyché
Le langage populaire nous le dit bien, nos états émotionnels « impactent » notre corps. « J’en ai plein le dos », « Je ne l’ai pas digéré », « Ça me fait suer ». Et c’est ce que nous montre la pratique en Psychologie biodynamique. Une assistante de direction se présente, résignée et souffrant depuis peu de douleurs aux épaules et de courbatures dans les bras. Il se trouve qu’une nouvelle directrice, qui a récemment pris le poste au-dessus d’elle, lui impose un travail très répétitif et rejette toutes ses initiatives. Le thérapeute l’invite alors à sentir son corps et elle sent que « les bras lui en tombent de découragement ». Il remarque aussi que ses mains sont gonflées, alors que ses doigts sont très étroits. A l’aide de massages biodynamiques, il lui masse les doigts à plusieurs reprises et l’accompagne dans son ressenti émotionnel. Les douleurs aux épaules commencent alors à bouger vers les coudes. La patiente sent des courants circuler dans le haut des bras, jusqu’au jour où elle tape du poing sur la table avec sa directrice et réclame de meilleures conditions de travail.
Le corps sait digérer le matériel psychique
Une des grandes découvertes de Gerda Boyesen, fondatrice de la Psychologie biodynamique, a été que le corps a la capacité naturelle de digérer les émotions. Elle s’est aperçue, après avoir expérimenté la sublimation psychanalytique et la catharsis émotionnelle, qu’il existait une 3e voie de transformation du matériel psychique : une voie par le corps, dite « par le bas ». Un des grands mécanismes de régulation psychologique de l’organisme est alors relié au système digestif et au système nerveux qui l’entoure – appelé communément « le 2e cerveau » tellement il est important. Cela fait que ce système nerveux entérique et nos intestins digèrent non seulement la nourriture physique, mais psychique aussi. Les fluides, les résidus métaboliques et nerveux liés à nos états d’âme sont amenés à passer la paroi intestinale et sont donc littéralement éliminés de l’organisme. « Le corps a, nous explique Gerda Boyesen, dans sa propre organisation, un mécanisme pour dissoudre et résoudre le matériel inconscient et le stress. Ce mécanisme est situé en profondeur dans le système végétatif. Je l’ai appelé le « psycho-péristaltisme »*. Le psycho-péristaltisme permet donc le nettoyage des effets de la psyché sur le corps.
Une anatomie émotionnelle
Toute fois la vie ne permet pas toujours les conditions idéales de sécurité, de temps et de disponibilité pour laisser au corps le soin de faire ce travail de digestion émotionnelle. Cela fait que l’on peut trouver en dépôt, dans le corps, des résidus psychiques non digérés. Etant confrontée à ces phénomènes de « mémoires corporelles », la Psychologie biodynamique a développé au fil d’une longue recherche clinique, une cartographie psychologique du corps. Car ces blocages ne se font ni au hasard ni n’importe où dans l’organisme. Selon la fonction psychologique affectée, la fonction organique équivalente le sera en écho. Par exemple, nous pouvons voir que le biceps sert à ramener vers soi. La qualité musculaire du biceps d’une personne qui a du mal à prendre et retenir ce qui est bon pour elle sera affectée par cette difficulté psychologique et fonctionnelle. Ainsi lors du travail thérapeutique, le thérapeute accompagne le patient afin de révéler son anatomie émotionnelle, de soutenir le psycho-péristaltisme et l’accompagne dans l’émergence de ce qu’il est profondément.
Notre corps, un chemin vers l’âme
Accepter de rencontrer notre présence corporelle, dans toutes ces facettes, ouvre véritablement un chemin vers les aspects les plus puissants de notre être essentiel. Le corps est une source d’une conscience insoupçonnée. Dans notre société à tendance patriarcale où le corps, le féminin et la nature sont domestiqués, nous oublions combien il est important de ressentir en nous-même la magie de la vie faire son travail. Et nous pouvons voir avec l’expérience thérapeutique, combien plus les personnes vont à la rencontre de leur corps, plus elles rayonnent et semblent douées de facultés nouvelles. La Végétothérapie biodynamique permet par exemple d’amplifier et de laisser émerger cette puissance vivante au cœur de l’organisme. Une personne est allongée et le thérapeute l’invite à sentir son corps, à laisser faire ce qui a besoin d’être là. Il restera constamment à l’écoute de ces moindres signaux involontaires. Par exemple, une personne sent une boule dans le ventre. A l’écoute de ses sensations, cette boule commence à bouger, à vouloir monter. La personne se cambre, étire les bras, cherche à faire passer cette boule dans la poitrine. Elle contacte alors une profonde nostalgie et finit par éclater en sanglot ; il lui revient alors une vieille blessure jamais consolée. Après de chaudes larmes, la tension a disparu. Une nouvelle vitalité apparaît qui irrigue son organisme. Elle dit avoir envie de battre des ailes. Elle se sent jouir d’une force et d’une liberté jusque-là inconnues et laisse une grande vague parcourir tout son corps. Puis le mouvement se calme. Elle sent que tout son être est irrigué par des courants de vie. L’écoute consciente du corps est un véritable chemin à la découverte de continents inconnus. Derrière la surface se cache notre essence lumineuse et joyeuse, pleine d’amour et d’humour.
* Interview de Gerda Boyesen par Christiane Lewin.